Fantasmes récurrents, fétichismes, obsessions sexuelles qui vous posent question
- Morgane Beauvais
- 28 mars
- 7 min de lecture
Dernière mise à jour : 9 avr.
Il y a des désirs qu’on n’ose pas toujours nommer. Des images qui reviennent, des scénarios qui nous hantent, des objets ou des situations qui nous excitent plus qu’on ne l’aurait imaginé. Et parfois, cette part de nous intrigue, inquiète, ou même fait honte.
Vous avez peut-être des fantasmes récurrents, un fétichisme sexuel que vous cachez, ou des pensées obsédantes qui vous troublent. Est-ce normal ? Faut-il s’inquiéter ? Comment en parler ? Et surtout, que faire quand cela pèse sur votre bien-être ou votre vie intime ?
Dans cet article, je vous propose un éclairage professionnel et bienveillant pour mieux comprendre ces expériences intimes, lever les tabous, et retrouver une relation plus libre à votre sexualité.

Sommaire :
Quand nos désirs nous troublent
Certaines pensées sexuelles nous échappent. Elles surgissent sans prévenir, se répètent, s’imposent parfois à nous jusqu’à devenir envahissantes. Qu’il s’agisse de fantasmes récurrents, de fétiches assumés ou cachés, ou d’obsessions sexuelles, ces expériences intimes peuvent soulever des questions, de l’inconfort, voire de la honte.
Beaucoup de personnes viennent consulter un·e sexologue avec cette question au bord des lèvres : « Est-ce normal ? » Derrière cette interrogation se cache souvent une souffrance : celle de ne pas comprendre ce qui se joue, de se sentir seul·e, anormal·e, incompris·e. Cet article propose de mieux comprendre ce qui différencie fantasmes, fétichisme sexuel et obsession sexuelle, et d’explorer ce qu’ils révèlent de notre rapport au désir, à nous-mêmes et aux autres.
Fantasme, fétichisme, obsession : quelles différences ?
Le fantasme sexuel
Le fantasme sexuel est une construction imaginaire, un scénario mental qui éveille le désir. Il peut surgir spontanément ou être recherché. C’est un espace de liberté où les normes sont transgressées sans conséquences. Le fantasme fait partie de la vie psychique sexuelle, même lorsqu’il revient souvent.
Il existe d’ailleurs des fantasmes très répandus, qui peuvent surprendre par leur fréquence : faire l’amour dans un lieu public, être soumis.e ou dominer, regarder ou être regardé·e, vivre une relation avec plusieurs partenaires, expérimenter une situation interdite ou transgressive. Avoir ce type de fantasmes ne signifie ni les vouloir réellement, ni être “anormal·e”. Ce sont des constructions mentales, parfois révélatrices, souvent libératrices !
Le fétichisme
Le fétichisme sexuel désigne une excitation centrée sur un objet, une matière ou une partie du corps. Il devient un vecteur du désir. Il n’est pas pathologique en soi. Cela peut être vécu comme un jeu, une particularité, ou une part intime du plaisir.
Parmi les fétichismes les plus courants, on retrouve les pieds, les sous-vêtements, le cuir, le latex, les talons hauts, les odeurs corporelles, certaines textures ou encore les ballons gonflables (aussi appelés looners). Le fétichisme peut aussi concerner des dynamiques (comme l’humiliation ou l’hyperféminisation) ou des objets très précis. Là encore, tout dépend de la manière dont cela est vécu : en liberté ou dans la contrainte, dans la joie ou dans la souffrance.
L’obsession sexuelle
L’obsession sexuelle est différente : elle s’impose, devient intrusive, source d’angoisse. On parle de sexualité compulsive quand le désir devient incontrôlable et crée une réelle souffrance. Ce n’est plus un espace de liberté, mais une contrainte intérieure.
Et la perversion sexuelle, alors ?
Le terme de perversion sexuelle appartient davantage à l’histoire de la psychiatrie et de la psychanalyse. Aujourd’hui, on parle plutôt de troubles paraphiliques dans les classifications médicales, uniquement lorsqu’un fantasme ou une pratique entraîne une souffrance, un danger ou une atteinte au consentement d’autrui. La plupart des fantasmes, fétichismes ou pratiques dites "atypiques" ne relèvent d’aucune pathologie. Ce qui compte, c’est le consentement de chacun.e, le respect des limites de chacun.es, et l’absence de souffrance ou de danger.
Pourquoi certains fantasmes ou fétichismes reviennent sans cesse ?
Lorsqu’un fantasme sexuel ou un fétichisme revient régulièrement dans l’imaginaire, ce n’est pas en soi un signe de problème. Le psychisme humain fonctionne souvent par répétition : il revient vers ce qui l’apaise, l’excite ou lui permet de réguler une tension interne. Ces scénarios ou objets de désir récurrents peuvent avoir une valeur symbolique forte, parfois inconsciente. Ils sont comme des repères dans le monde intime, des refuges émotionnels, des zones de sécurité ou de stimulation.
Un fantasme peut ainsi se fixer autour d’un souvenir sensoriel marquant, d’une scène vue dans l’enfance, d’un moment de solitude, ou d’un désir inassouvi.. Le fétichisme, de la même manière, peut exprimer un besoin de structure, de contrôle, ou au contraire, de lâcher-prise total. Derrière cette répétition, il y a souvent une fonction psychique : celle de canaliser une émotion, de compenser un manque, ou d’offrir un espace où l’on se sent vivant·e, libre, ou tout simplement soi-même.
Ce n’est donc pas la répétition qui est problématique en elle-même, mais ce qu’elle génère en vous. Si ce fantasme devient une obsession envahissante, si ce fétichisme isole ou crée de la honte, s’il vous empêche d’avoir une sexualité épanouissante avec un·e partenaire ou d’explorer d’autres facettes de vous, alors il peut être précieux d’en parler.
Mettre des mots, dans un espace thérapeutique sécurisant, permet souvent de redonner du sens à ces désirs, de les replacer dans un contexte plus large, et parfois, de les apprivoiser autrement.
Est-ce “normal” ? Quand faut-il s’inquiéter ?
La question du « normal » revient souvent en consultation. Pourtant, il n’existe pas de norme unique en matière de sexualité. Ce qui est “normal”, c’est ce qui vous permet de vivre votre désir avec plaisir, liberté et apaisement, sans nuire à vous-même ni à autrui. À l’inverse, ce qui fait souffrir, isole, provoque une honte persistante ou détériore vos relations mérite d’être entendu et accueilli avec sérieux, sans jugement.
Un fantasme récurrent ou un fétichisme inhabituel n’est pas en soi un signe de problème. Ce n’est pas sa fréquence, sa forme, ni son intensité qui posent question, mais la place qu’il prend dans votre vie et l’impact qu’il a sur votre bien-être. Est-ce que cela vous empêche de vivre votre sexualité de manière épanouie ? Est-ce que cela suscite en vous du mal-être, de la culpabilité, une perte de contrôle ou un sentiment d’étrangeté à vous-même ? Est-ce que cela crée un fossé entre vous et vos partenaires ?
Dans tous les cas, vous avez le droit de vous interroger sans vous juger. Mettre des mots sur vos pensées, vos désirs, vos peurs, c’est déjà alléger une partie du poids qu’ils peuvent représenter. Imaginer n’est pas agir. Votre vie intérieure vous appartient. Elle peut être riche, mouvante, parfois troublante, mais elle est légitime. Ce n’est pas ce que vous pensez qui définit qui vous êtes, mais la manière dont vous choisissez de vous relier à vos désirs, et ce que vous en faites.
Fétichimes et vie de couple : comment en parler ?
Avoir un fétichisme sexuel ou des fantasmes inhabituels ne rend pas incompatible avec une vie de couple épanouie. Mais ces désirs singuliers, parfois tabous ou incompris, peuvent devenir source de tension lorsqu’ils sont tus, refoulés ou mal partagés. Le silence alimente souvent la honte, et la peur d’être rejeté·e empêche de créer un véritable espace d’intimité.
Pourtant, le dialogue autour des fantasmes et des pratiques fétichistes peut enrichir la relation, à condition qu’il soit guidé par l’écoute, le respect mutuel et le consentement. Il ne s’agit pas de convaincre l’autre d’adhérer à un désir, ni d’imposer une pratique, mais de trouver ensemble une manière d’en parler, de poser des mots, et peut-être d’explorer à deux un terrain commun, symbolique ou réel.
Certains couples choisissent d’en faire un jeu, un récit, un espace de complicité. D’autres préfèrent poser des limites claires, mais en gardant la liberté d’échanger sans jugement. Tout est possible dès lors que chacun·e se sent libre de dire oui, non, ou peut-être.
Je propose un accompagnement adapté, que ce soit en individuel ou en couple, pour vous aider à nommer vos désirs, poser vos limites, comprendre vos freins et co-construire une sexualité qui respecte les besoins de chacun·e. Parler de ses fétiches ou de ses fantasmes, ce n’est pas forcément les réaliser. C’est d’abord se sentir reconnu·e dans ce qui nous traverse — et parfois, cela suffit déjà à transformer le lien.
Accueillir sa sexualité dans toute sa complexité
Il n’existe pas de sexualité idéale. Vos désirs, vos pensées, vos pratiques ne vous définissent pas. Ce qui compte, c’est la façon dont vous les vivez. Vous avez le droit de chercher, d’interroger, d’explorer.
Si ces questions vous troublent ou vous pèsent, vous n’êtes pas seul·e. Il existe des espaces pour en parler.
Ce qu’on explore en sexothérapie
En tant que sexologue, je vous propose un cadre confidentiel, sécurisé et sans jugement pour déposer ce que vous vivez. Il n’est pas toujours simple de parler de ses fantasmes, de ses attirances particulières ou de pensées qui dérangent. Pourtant, lorsque ces sujets sont accueillis avec bienveillance, il devient possible de leur redonner du sens, de les comprendre autrement, et parfois de les apaiser.
En consultation, nous explorons ensemble ce que vos fantasmes récurrents ou vos fétichismes racontent de vous, d’où ils viennent, ce qu’ils activent en vous, et comment ils s’inscrivent dans votre vie intime. Parfois, il s’agit de mieux les accepter, de les intégrer à votre sexualité d’une manière plus sereine. D’autres fois, l’objectif est plutôt de prendre du recul, de relâcher une emprise qui devient envahissante, ou de sortir d’un rapport compulsif et souffrant à la sexualité.
Il ne s’agit jamais de juger ou de pathologiser ce que vous vivez, mais de vous accompagner là où vous en êtes, avec vos questions, vos résistances, vos désirs. La sexothérapie peut ainsi vous aider à retrouver une sexualité plus libre, plus choisie, plus alignée avec qui vous êtes aujourd’hui.
Conclusion : Et si vous vous écoutiez ?
Vous pouvez vivre une sexualité libre, plurielle, et respectueuse de vous-même. Vous pouvez poser vos questions, sans honte ni peur. En tant que sexologue, je suis là pour vous écouter et vous accompagner.
Pour aller plus loin, quelques ressources :
Repenser le fétichisme, Revue Médicale Suisse, Francesco Bianchi-Demicheli, André Langaney
Des perversions sexuelles aux perversions morales, La jouissance et la domination, Alberto Eiguer
Fétichisme et aliénation, À propos des nouveaux objets transitionnels, Par Jean-Éric Douce